Sous la tente du
pacha, le repas nous attend. Un repas arabe… Dix plats s’alignent sur le tapis,
dans des bassins de cuivre remplis d’une eau bouillante et recouverts des
capuchons de sparterie noire et rouge, où se cache le mystère d’une cuisine
originale et savante : viandes cuites et recuites, mijotées pendant des
journées et que l’odeur des fruits pénètre, gâteaux et pates feuilletées sur lesquels
se sont posés, durant des heures et des heures, les yeux blancs des négresses
tournant autour des petits feux de braise dans les cuisines invisibles…
Pour table, un grand
plateau de cuivre, pour chaises, des coussins ; pour se servir, les doigts…
C’est une charmante douleur d’aller chercher sur la carcasse le blanc de poulet
qui se détache et de l’offrir plus agréable encore de recevoir des ces doigts
malhabiles un morceau de mouton sur lequel un œuf est posé comme une large
pièce d’or…
Pendant que les
plats se succèdent sur le plateau de cuivre, un violon, une guitare et un
tambourin à sonnettes jouent des airs d’Andalousie… Tout à l’heure, visible
encore par la porte de la tente, la lune a monté dans le ciel et ne laisse plus
voir que la nuit qu’elle illumine et les reflets de sa clarté sur les
mendiants, qui attendent dehors la fin de notre repas pour s’en partager les
restes…
Les repas sont
achevés sous les tentes. Il en est de silencieuses, où les gens étendus sur les
coussins se reposent, causent doucement, cependant qu’un serviteur prépare les
tasses de thé et les distribue à la ronde… Il y en a d’autres qui ressemblent à
une véritable mosquée, où tous les hôtes, réunis autour des chandeliers de
cuivre, récitent des litanies…
Mais la plupart de
ces maisons de toile sont des chambres de musique, des pavillons de poésie. Partout
la guitare appelle, le violon gémit, le tambourin se démène…
L’Andalousie
refleurit sur ces tapis étendus dans le sable.
Jérome et Jaen Tharaud
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